Premier à tirer la sonnette d’alarme, le professeur d’économie Michel Mouillart, qui compile les données pour l’Observatoire des crédits aux ménages, un organisme financé par la Fédération bancaire française (FBF). « À coup sûr, au moins 100 000 et jusqu’à 130 000 ménages seront mécaniquement exclus par ces mesures de l’accès à la propriété cette année, soit près de 10 % des transactions réalisées en 2019 (NDLR : 1,3 million au total), estime-t-il.
Et la production de nouveaux crédits devrait être impactée de 10 à 15 milliards d’euros. Sachant qu’elle représente 185 milliards d’euros par an (NDLR : hors rachats de crédit), cela représente 8 % de la production », insiste l’expert, en se basant sur les restrictions émises par le Haut conseil de stabilité financière (HCSF) présidé par le ministre des Finances Bruno Le Maire.
L’autorité laisse un peu de latitude aux banques : 15 % de leurs crédits peuvent aller au-delà de ces deux règles. « L’accès au crédit immobilier sera clairement maintenu », assure le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau. Interrogé par le Parisien, il estime les chiffrages sur le nombre de prêts menacés sans « aucun fondement », et appelle à assainir et à « mettre un coup d’arrêt » à « la dérive » d’une mensualité au-delà de 33 % des revenus perçus.
« Deux dossiers d’emprunteurs au smic nous ont été récemment refusés, affirme Sandrine Allonier, responsable des partenariats bancaires auprès de Vousfinancer. Les banques sont aussi plus attentives au secteur d’activité de l’emprunteur et l’entretien de surface ou la restauration sont considérés comme risqués. » Pour Meilleurtaux.com, l’enjeu est social. « Pour accéder à la propriété, les revenus modestes devront augmenter leur apport personnel, mais encore faut-il que ce soit possible », s’alarme Maël Bernier, sa porte-parole.
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Et c’est justement la crainte de Michel Mouillart qui anticipe déjà un effet domino sur l’économie : « 40 000 à 50 000 acquisitions censées faire l’objet de travaux de mise en conformité n’en feront finalement pas l’objet car leurs acquéreurs devront privilégier l’apport en capital pour que leur dossier passe… Ce qui signifie que ces travaux, s’ils ont lieu, seront financés par un crédit à la consommation, plus coûteux et à risque… Au final, tout le monde y perd. »